Article mis à jour le 27 octobre 2023.
On a donc des teneurs « faibles », « modérées » et « riches » en fodmaps pour chaque ingrédient, associées à des quantités très précises.
Mais comment arrive-t-on à un tel niveau de précision ? Qui sort ces chiffres ? Comment est-ce mesuré ?
Julie Delorme, dans son livre de 2018 Mon alimentation santé facile : pauvre en FODMAPs (que je vous recommande chaudement, surtout pour 5,9€), explique ce processus :
Pour déterminer la teneur d’un fruit ou d’un légume, il est nécessaire de récolter des échantillons de 500 grammes issus de cinq supermarchés et de cinq magasins bio, et successivement de les broyer, les congeler, les déshydrater avec de l’eau chaude, d’ajouter d’éventuels enzymes spécifiques et de doser chaque catégorie de FODMAPs par une technique précise de chromatographie liquide à haute performance.
Tout un programme ! Chaque ingrédient est testé un à un par cette méthode.
Pour les céréales et les graines, la méthode est un peu différente des fruits et légumes, bien que similaire. La méthode n’est pas exactement la même en fonction de si l’on analyse la teneur en fructanes ou celle en GOS par exemple, maintenant ce sont des détails techniques trop pointus pour être abordés en détails.
Cependant on ne peut pas toujours généraliser en parlant d’un aliment, il faut parfois distinguer certains modes de conservation (en conserve, dans du vinaigre…), certaines parties (partie verte ou blanche d’un poireau), certains états (frais, bien mûr, séché…) qui ont des impacts sur la teneur en fodmaps.
Veau, vache, cochon…
Pour ce qui est des viandes, poissons, mollusques, crustacés, oeufs : on sait qu’ils ne contiennent aucun glucides, donc aucun fodmaps. Il est alors inutile de les tester, il n’y a pas de restriction sur le plan fodmaps.
Une fois que les valeurs sont établies par ces analyses
La dernière étape consiste à déterminer par un diététicien des portions qui soient faibles, modérées ou riches en fodmaps, ce que l’on retrouve dans l’application par exemple. (source 3)
Combien de temps pour analyser un aliment ?
Entre 2 et 4 semaines ! (source 3)
Oui, c’est un travail long, en plusieurs étapes et qui demande une main d’oeuvre qualifiée. Ils ont encore beaucoup d’ingrédients à tester, voire à retester.
Qui mène ces études ?
Je ne connais que l’université de Monash en Australie, mais il est possible que d’autres institutions travaillent également sur ce sujet.
Les limites régionales
Vu que l’université de Monash est la source de référence, et visiblement la seule institution à faire ces tests, on peut se demander dans quelle mesure leur approvisionnement en fruits et légumes exclusivement australiens peut avoir un impact sur ces tests. Est-ce que nos endives, nos fraises, nos melons ou nos choux ont réellement les mêmes teneurs ?
Cela ne doit pas changer du tout au tout, mais quand on voit qu’à quelques grammes près un ingrédient bascule de « faible » à « modéré », ou « modéré » à « fort », on peut se poser la question.
C’est d’ailleurs une limite identifiée par les chercheurs de Monash eux-mêmes :
D’autres tables de compositions FODMAP d’aliments spécifiques à chaque pays sont urgemment requises, avec un nombre de facteurs propres à chaque pays connus pour affecter la composition de la nourriture et des teneurs en FODMAP, incluant des procédés agroalimentaires uniques, l’approvisionnement, les habitudes alimentaires et la culture culinaire.
[…]
[Cela est] nécessaire pour que ce régime soit implémenté plus facilement à l’international.
[Source 2]
Effectivement, des produits non bruts comme une sauce soja, un foie gras, une ricotta, du miel ou une bière sont tous dans la base de données de Monash mais sont très loin d’être uniformes, que ça soit dans le commerce ou réalisés « maison ».
J’ai évoqué dans mon guide du fromage fodmap que les ricottas vendues en supermarché français avaient des taux de lactose avec des différences de 50%. J’ai établi que les miels ont des rapports fructose/glucose très différents dont certains pourraient malgré tout nous convenir. La variété des bières que l’on peut trouver en Europe n’a rien à voir avec la bière blonde australienne.
Lors de l’introduction du régime fodmap aux Etats-Unis, Monash s’est rendu compte des différences qui étaient parfois très gênantes. Des variétés locales de céréales ont montré des variations de teneur de fodmaps. L’étiquetage des produits est souvent flou, autorisant les industriels à cacher des oignons et de l’ail derrière les termes de « exhausteur de goût » ou « épices ». [source 2]
Les limites des quantités testées
Un ingrédient sur l’application de Monash est souvent testé en différentes quantités, qui peuvent correspondre à des portions normales de consommation. Mais parfois, seule une quantité est testée et est rédhibitoire.
La farine de châtaigne est par exemple évaluée comme riche en fructanes à 100 grammes, mais c’est la seule quantité testée. Cela ne veut pas dire qu’en plus petite quantité, la teneur soit également riche, on pourrait facilement imaginer qu’elle passe à modérée voire faible, d’autant plus que la châtaigne n’a aucune restriction. Cela vaut pour d’autres ingrédients de leur liste, comme le chou-fleur (riche en mannitol à 75 grammes) ou le topinambour.
Il faut donc parfois prendre leur travail avec des pincettes. Leur méthodologie est très sérieuse et inattaquable, mais il faudrait beaucoup plus de chercheurs qui étudient chaque région du monde pour obtenir un niveau de finesse qui peut faire parfois défaut. Le monde anglo-saxon commence à être bien couvert, mais pas le reste.
Aliments retestés : résultats différents
Les retours « terrain » font qu’il est parfois pertinent de re-tester des aliments, de nombreux facteurs peuvent faire évoluer la teneur en fodmaps des aliments. J’en parle plus en détails ici, car fin 2021 et début 2022, une salve de nouveaux tests ont sérieusement changé la donne pour des basiques de notre régime.
Sources
- Mon alimentation santé facile : pauvre en FODMAPs, livre de Julie Delorme de 2018 [source 1].
- FODMAPs: food composition, defining cutoff values and international application, papier de recherche de 2017 par Jane Varney, Jacqueline Barrett, Kate Scarlata, Patsy Catsos, Peter R Gibson et Jane G Muir [source 2].
- FODMAP testing – inside the Monash FODMAP lab!, blog post de l’université Monash de septembre 2015. [source 3]
Bonjour, lecture … seule la choucroute semblerait me convenir d’un point de vue digestif alors que les autres variétés dechoux me sont interdits choux fleur etc …. alors que la choucroute contient du Mennitol ……. ?
Il faut analyser par famille de fodmaps effectivement. Si la choucroute passe chez vous, alors vous avez de grandes chances que le chou-fleur passe aussi vu que c’est aussi du côté du mannitol qu’il pose problème. D’autres choux sont plutôt riches en fructanes ou en sorbitol, je fais le point ici : https://blog.fodmapedia.com/choux-fodmaps/
Bonjour ! Les quantités d’un aliment autorisées ne sont pas dépendantes du poids de la personne ? Dans la phase de restriction, j’ai cru comprendre que je peux manger la même quantité d’un aliment qu’une personne qui pèse deux fois mon poids. Mais je ne comprends pas comment c’est possible… Avez-vous une explication ?
Alors la réponse est non, les quantités ne dépendent pas du poids, j’en suis sûr, par contre je serai bien en peine de vous donner une explication sourcée / argumentée. En conclusion, ne vous en préoccupez pas, cela simplifie pas mal les choses ! (même si je comprends votre interrogation)